Usher a écrit : ↑31 mai 2024, 09:32
En tout cas, très heureux que la querelle semble réaliste parce qu'elle a lieu entre deux personnages qui ne s'expriment pas de la même manière. Conserver un caractère naturel à cette dispute, avec ses ruptures de rythme et ses emportements, dans un dialogue ou l'un parle en prose et l'autre en vers, a été un véritable cauchemar formel.
ATTENTION SPOILER
Ca sonne juste, mais surtout ça sonne réellement dispute adultérine aucun autre motif me vient en tête. Le départ ne laisse rien présager et on sent une montée aux extrêmes, que l'incompréhension monte, que chacun cherche à blesser tout en préservant son égo, qu'on franchit un peu plus le Rubicon et que le sort en est jeté. Une dispute de ce genre est un aller simple.
De manière assez drôle, j'avais ressenti une émotion un peu similaire à la fin de Deus Ex : Human Revolution, où la chercheuse compagne du héros est kidnappée dès l'introduction pour finalement vers la fin du jeu, poursuivre ses recherches presque tranquillement sous la garde de son kidnappeur avec un léger relent de syndrome de Stockholm.
Alors je vais probablement déclencheur une guerre mais "tans pis". Je voulais savoir quelle étaient selon vous les meilleures traductions de l’Iliade et de l'odyssée d’Homère ? Vous allez me dire que meilleure çà ne veut rien dire dans ce contexte, et vous auriez raison donc je vais expliciter ma posture. Je souhaite savoir quelle traduction je dois prendre dans le cas où je ne suis pas un universitaire qui étudie un texte, mais juste un clampin qui veut lire une bonne histoire bien racontée ? en somme je compte lire l’Iliade ou l'odyssée comme on lirait le seigneur des anneaux. Je ne compte de toutes façon pas apprendre le grec ancien juste pour lire UN livre parce que j'ai autre chose à foutre de ma vie, je suis prêt à pardonner les éventuels libertés que prendrait le traducteur avec le texte d'origine à partir du moment où il ne part pas dans des délires comme je sais pas ... inventer un arc filler où ils se mettent à faire du volley ball sur la plage en slip de bain ou que sais-je, mais si il dit bleu et qu'en grec ancien c'est violet je pense que je pourrais y survivre.
Je viens d'achever L'amie prodigieuse d'Elena Ferrante initialement paru en France en 2014. Il s'agit du premier tome d'une tétralogie.
Dans ce Naples des années 1950, où Elena et son amie Lila grandissent, s'entraident et se font souffrir mutuellement, j'y ai trouvé des airs d'Annie Ernaux avec son La place. Cependant Naples étant Naples, s'ajoute à tout cela une violence parfois héritée, implicite, explicite, intériorisée et extériorisée, contre soi, contre les siens et contre les autres. Sur les "pavés où l'on a fait le salut romain", les gamins des années 50 portent sur leurs épaules tout un passé à peine évoqué mais dont tout le poids se fait sentir des années après. Du petit commerce bâti grâce au marché noir, en passant par la cordonnerie, seule l'école semble, pour les deux protagonistes, un refuge où une seule d'entre elle pourra rester.
Sans trop savoir initialement où cela allait, je dois avouer y avoir trouvé quelques fulgurances d'une beauté simple, d'une épaisseur de vécue racontée par une mémoire humiliée par la pauvreté.
C'était la vie, un point c'est tout, nous grandissions avec l'obligation de la rendre difficile aux autres avant que les autres ne nous la rendent difficile
En somme : une très belle surprise estivale.
Dernière modification par Oswald le 19 juil. 2024, 07:11, modifié 1 fois.
Je viens de finir le troisième tome du "Chevalier aux Epines" et bon sang, que c'est bien écrit...
... j'aime même la fin
le vocabulaire est enlevé mais si bien maîtrisé que ça n'est pas pompeux. Les intrigues tiennent la route, avec des retournements de situations plausibles.
L'ensemble est bien rythmé avec du roman chevaleresque, du fantastique (je n'ai pas écrit fantasy!), de l'aventure... Haa, j'attendais l'occasion de retourner dans le Vieux Royaume, je n'ai pas été déçu!
En toute logique Starwarsienne, nous attendons donc maintenant une nouvelle trilogie qui se passera avant. Ou un truc du genre, tant qu'on a notre dose.
Merci pour le retour de lecture, Taillefer ! Et tu as raison sur le fantastique : j'avais bel et bien pour projet d'écrire du médiéval-fantastique, en prenant les deux termes de la catégorie au pied de la lettre.
Bien vu sur les développements, Kynan2. J'ai en projet aussi bien un récit qui se déroule quelques années auparavant qu'un autre roman qui fait suite aux événements du Chevalier aux épines. Mais ce ne sera pas pour tout de suite : pour l'instant, je travaille sur les Celtes en partance pour des territoires inconnus et les lascars me demandent un boulot phénoménal.
Usher a écrit : ↑17 juil. 2024, 09:13
Merci pour le retour de lecture, Taillefer ! Et tu as raison sur le fantastique : j'avais bel et bien pour projet d'écrire du médiéval-fantastique, en prenant les deux termes de la catégorie au pied de la lettre.
Bien vu sur les développements, Kynan2. J'ai en projet aussi bien un récit qui se déroule quelques années auparavant qu'un autre roman qui fait suite aux événements du Chevalier aux épines. Mais ce ne sera pas pour tout de suite : pour l'instant, je travaille sur les Celtes en partance pour des territoires inconnus et les lascars me demandent un boulot phénoménal.
J'ai tellement hâte de me replonger dans la saga Roi du Monde !!
Merci encore pour ton travail
Pour ma part, je me suis enfin lancé dans la lecture du cycle de la Fondation (Asimov), et même si je n'ai pas encore fini, c'est vraiment remarquable !
Je constate aussi avec tristesse à quel point la série Apple TV a massacré le roman, jusque dans ses principes de base :/
Usher a écrit : ↑17 juil. 2024, 09:13
Merci pour le retour de lecture, Taillefer ! Et tu as raison sur le fantastique : j'avais bel et bien pour projet d'écrire du médiéval-fantastique, en prenant les deux termes de la catégorie au pied de la lettre.
Bien vu sur les développements, Kynan2. J'ai en projet aussi bien un récit qui se déroule quelques années auparavant qu'un autre roman qui fait suite aux événements du Chevalier aux épines. Mais ce ne sera pas pour tout de suite : pour l'instant, je travaille sur les Celtes en partance pour des territoires inconnus et les lascars me demandent un boulot phénoménal.
Mais ni Jedi ni Jar Jar Binks, hein !
Notre campagne à Ciudalia se poursuit bien, avec quelques interruptions estivales. Les Quattro Compari saluent bien bas Benvenuto !
Je sors de la lecture d'un gros livre (en fait, juste le premier tome) d'une histoire de la Société de Jésus. Dit comme ça, ça a l'air très soporifique. En fait, c'est tout à fait passionnant. C'est d'ailleurs de ce livre que j'ai tiré l'anecdote du dossier Mateo Sanchez, qui est en soi un vrai filon pour des scénarios internationaux pour Te Deum pour un massacre.
Il s'agit donc d'un livre de Jean Lacouture, Jésuites, une multibiographie, dont le premier tome consacré aux deux siècles qui vont de la fondation de l'ordre au XVIe siècle jusqu'à son interdiction par Clément XIV au XVIIIe est intitulé Les Conquérants. Histoire extraordinaire que cette petite confrérie de professeurs et d'étudiants parisiens fondée en 1539 qui, dix ans plus tard, a déjà envoyé l'un des siens, François Xavier, en mission au Japon ! Histoire extraordinaire du fondateur, Ignace de Loyola, un "born again" après une horrible blessure au siège de Pampelune, qui demeure quelques années sur la ligne de crête entre fanatisme et mysticisme avant d'approfondir ses études à Paris et de fonder un ordre de savants. Histoire extraordinaire de Mateo Ricci parti convertir la Chine dès la fin du XVIe siècle qui, parlant couramment le mandarin, ayant absorbé toute la littérature chinoise, se sert de l'astronomie, des mathématiques et de l'horlogerie pour accéder à la Cité interdite. Histoire extraordinaire de la République des missions jésuites du Paraguay, fondée par la Société de Jésus pour convertir et défendre les Guaranis, qui fit commerce du maté pour acheter des armes, repoussa les trafiquants d'esclaves portugais venus du Brésil et excita tant de convoitises qu'elle finit par être attaquée par une alliance des couronnes d'Espagne et du Portugal…
Jean Lacouture est journaliste, pas historien, même si son érudition est remarquable. Mais le lieu d'où il écrit donne un angle particulièrement intéressant à son livre. Issu d'un milieu catholique, ancien élève d'un collège de jésuites, il a été attaché de presse du général Leclerc envoyé en Indochine dans l'immédiat après-guerre et, sur place, il a remis en question toutes ses convictions passées : devenu anticolonialiste dès les années 1940, passionné par l'Asie (au point d'ailleurs de s'aveugler sur des dirigeants comme Hô Chi Minh, ce qu'il a ensuite regretté), Lacouture s'intéresse donc particulièrement à la rencontre entre la pensée jésuite et les philosophies orientales, s'attachant à montrer comment de grands missionnaires comme François Xavier ou Mateo Ricci ont évolué de la prédication à la discussion entre les cultures, et comment le christianisme propagé par les jésuites s'est teinté de confucianisme voire de shintoïsme – ou d'animisme au Paraguay, saint Thomas étant amalgamé avec une figure mythologique des Guaranis.
Livre dense, mais souvent passionnant. Le style vigoureux de Lacouture est en outre agréable.
Je voulais partager cette magnifique citation de Joe Halderman.
“Bad books on writing tell you to "WRITE WHAT YOU KNOW", a solemn and totally false adage that is the reason there exist so many mediocre novels about English professors contemplating adultery.”
J'ai récemment lu la Vie de saint Louis de Jean de Joinville et j'en suis sorti enthousiasmé.
En fait, voilà assez longtemps que je connaissais le livre et que j'en avais lu des extraits, surtout consacrés à la tragique équipée de la septième croisade, mais c'est la première fois que j'ai lu l'œuvre intégrale, dans sa traduction moderne mais en allant de temps en temps lire le texte en ancien français. Contrairement à ce que laisse entendre le titre moderne, ce livre n'est pas une biographie. Joinville l'avait intitulé "Livre des saintes paroles et des bons faiz de nostre saint roy Looÿs", ce qui est beaucoup plus fidèle à l'organisation de l'ouvrage. Mais derrière le livre de souvenirs hagiographiques on plonge aussi dans un récit fascinant sur la rencontre entre les civilisations médiévales et, de façon très émouvante, dans l'histoire d'une amitié entre un roi et un petit féodal qui fut aussi une histoire d'amitié entre deux compagnons d'armes et de misères.
L'écrivain lui-même sort de l'ordinaire. Sénéchal de Champagne, Jean de Joinville n'est pas clerc mais chevalier ; mais il s'agit d'un de ces "chevaliers lettrés" qui est un peu frotté de latin et à qui il arrive d'écrire. Dans sa jeunesse, il a composé une sorte de livre de piété, Li romans as ymages des poinz de nostre foi ; l'ouvrage a peut-être été composé à la suite de sa captivité en Egypte, pour raffermir sa foi chrétienne après avoir subi la prédication de prêcheurs musulmans. C'est dans sa vieillesse que Joinville compose la Vie de Saint Louis, car notre auteur est d'une longévité extraordinaire pour l'époque : né vers 1224, il ne meurt qu'en 1317. Jusqu'à l'âge de quatre-vingt-dix ans, il continue à répondre aux convocations au ban et participe encore ponctuellement à des opérations militaires. Sa Vie de Saint Louis est composée au début du XIVe siècle, plus de trente ans après la mort de Louis IX, et terminée en 1309. Joinville est donc, déjà de son vivant, le témoin d'une époque disparue. Il a servi un saint (pas commode, d'ailleurs, le saint) et termine sa vie sous le règne de ceux que Maurice Druon surnommera "les rois maudits". A quelques allusions, Joinville laisse d'ailleurs entendre qu'il n'a aucune sympathie pour le petit-fils de son ami, Philippe IV le Bel.
Ce qui m'a ravi dans sa Vie de Saint Louis ? Les brillantes enluminures qu'on y trouve au fil des souvenirs, comme le roi Louis et sa jeune reine Marguerite forcés de cacher leurs amours à la terrible belle-mère Blanche de Castille ; la mer couverte de voiles lors du départ de la flotte française de Chypre pour l'Egypte (splendeur éphémère : la flotte sera dispersée dès le lendemain par une tempête) ; la simplicité du roi qui n'hésite pas à s'asseoir à terre ou à exiger que ses proches s'assoient à côté de lui "à toucher sa robe" ; le début d'incendie dans la chambre de la reine sur la nef au retour de Terre Sainte, où la reine Marguerite, surprise par les flammes, lutta "toute nue" contre le feu… (Et je vous passe bien sûr Saint Louis sous son chêne, au bois de Vincennes.)
A ces images d'Epinal, il faut ajouter le regard objectif, presque naïf, que Joinville porte sur la guerre. Il ne l'idéalise pas, il ne la condamne pas non plus. Il témoigne de son absurdité, sa cruauté, d'exploits improbables, de crimes épouvantables, de désastres, de négociations à plusieurs bandes. Il montre comment la noblesse de France, toute imprégnée de valeurs chevaleresques, fait souvent n'importe quoi sur le champ de bataille, ce qui provoque d'ailleurs la mort d'un des frères du roi, Robert d'Artois, et l'écrasement de l'avant-garde au cours de la bataille de Mansourah. Il évoque aussi les discordes entre les différents royaumes musulmans, et l'absurdité terrible d'une situation où, à peine capturé, Louis IX est témoin de l'assassinat de son vainqueur le sultan Turan Chah par ses propres émirs avant de se voir proposer d'être élevé au rang de sultan par les assassins musulmans…
Enfin, ce que j'ai sans doute trouvé le plus passionnant et le plus vertigineux, c'est l'évocation de la rencontre entre ces Français du XIIIe siècle et les Mamelouks, les Bédouins, les Turcs Coumans, les émissaires des "Tartares" (des Mongols), sans parler des négociations avec les Assassins envoyés au roi de France par le Vieux de la Montagne, qui rivalise de menaces et de cadeaux… Joinville nous rapporte ce qu'il a vécu et ce qui lui a été dit, ce qu'il en a compris (parfois mal) et nous brosse un tableau de l'Orient où sont inextricablement mêlées la géopolitique médiévale et la légende. C'est absolument fascinant.
Bien sûr, le livre n'est pas sans défaut. Sa composition est un peu bancale, en particulier à la fin où, puisant dans les Grandes chroniques de France, Joinville recopie un long décret royal ("establissement") contre la corruption chez les officiers de la couronne. (Pas inintéressant, quoique plutôt aride ; et qui fait sens quand on sait que Joinville refusa de participer à la huitième croisade en arguant que les sergents du roi avaient ruiné ses gens quand il s'était absenté pendant la septième…) Mais globalement, en parcourant l'ouvrage comme un recueil de souvenirs, on a accès à une kyrielle d'anecdotes sur le roi, ses dilemmes, ses jugements, sa piété, ses maladies, et surtout sur la grande amitié scellée avec l'auteur au cours des années d'épreuve en Orient. Et puis, ce qui m'a pas mal marqué sur un plan plus littéraire, c'est que Joinville pense bel et bien écrire un "romanz", non au sens actuel du genre, mais au sens médiéval (un livre écrit en langue vulgaire à destination d'un public plus large que celui des clercs). Or, étant lui-même influencé par les romans de chevalerie, il note dans une page qu'il va "entrelacier" son récit. L'entrelacement littéraire passe donc de Chrétien de Troyes, qui écrit de la fiction, à Jean de Joinville, qui écrit des souvenirs, avant de revenir à la fiction dans d'innombrables ouvrages jusqu'au Seigneur des anneaux et à ses nombreux épigones…
Usher a écrit : ↑02 août 2024, 10:09
Je sors de la lecture d'un gros livre (en fait, juste le premier tome) d'une histoire de la Société de Jésus. Dit comme ça, ça a l'air très soporifique. En fait, c'est tout à fait passionnant. C'est d'ailleurs de ce livre que j'ai tiré l'anecdote du dossier Mateo Sanchez, qui est en soi un vrai filon pour des scénarios internationaux pour Te Deum pour un massacre.
Il s'agit donc d'un livre de Jean Lacouture, Jésuites, une multibiographie
[...]
Livre dense, mais souvent passionnant. Le style vigoureux de Lacouture est en outre agréable.
Il faudra que je me replonge dans ce livre, que j'ai lu voici "quelques" années (une petite trentaine d'années, de mémoire), et que j'avais, en effet, trouvé passionnant.
Merci de l'avoir ramené à la surface de mes souvenirs !
J'ai posé dans ma "pile à lire" les deux tomes d'Au bord de l'eau (en format de poche, mais il faut de grandes poches !).
J'en avais souvent entendu parlé, j'avais vu des adaptations - partielles - en film et en BD, mais je ne m'étais jamais penché sur le roman lui-même. Ce sera bientôt chose faite, dans une traduction remontant aux années 1970.
Éblouissant d'invention et de truculence, cette «œuvre de génie» - dira son éditeur Jin Sheng-tan - met en scène une bande de hors-la-loi et d'insurgés de toutes origines sociales. Férus d'arts martiaux, mais fort habiles aussi en bien d'autres domaines, ils se recrutent parmi les vagabonds du monde «des rivières et des lacs» et d'autres insoumis en délicatesse avec la justice ou les autorités. Ils forment, au fil des rencontres et des hasards, des duels et des batailles, une bande de frères jurés unis à la vie à la mort, puis se retranchent au cœur de vastes marécages («au bord de l'eau») dans un repaire minutieusement organisé et défendu, d'où ils lancent leurs expéditions de justiciers en narguant les armées du Fils du Ciel.
Aussi populaire en Chine qu'ici nos Trois Mousquetaires, ce roman, savamment ourdi, d'aventures violentes et subtiles, mêle ruse et ribauderie, farce et stratégie, panache et poésie. Son réalisme, ses intrigues et ses personnages inoubliables, son style alerte, sa verve en font le plus vivant et le plus coloré des chefs-d'œuvre.
