Oswald a écrit : ↑20 janv. 2024, 23:37
Je suis sur le séant car je viens d'écouter un épisode de procrastination du site Elbakin.net, dedans les chiffres qui sont avancés me semblent... étonnants. D'après les animateurs de l'émission, un succès de librairie de Fantasy pour adulte (enfin pour adulte, on s'entend, qui ne soit pas de la young fantasy) c'est "à peine" 3000 ventes. Cela vous semble être un chiffre honnête ? Cela me semble... ridiculement bas.
Bienvenue dans le monde fabuleux des petits éditeurs Pour ce que j'en sais d'après d'autres sources, le chiffre n'a hélas rien de fantaisiste. Il faut voir qu'il y a un gouffre entre les quelques titres qui se vendent énormément, parce que célèbres et/ou adaptés en films/jeux/etc., et tout le reste. Bien sûr, un George R. R. Martin, une Robin Hobb ou Tolkien se vendent plus que ça (encore que, pour Tolkien, ça dépend si on parle de ses livres les plus connus ou des autres). Mais la majorité des auteurs et autrices de fantasy, en France, vendent peu. Il me semble d'ailleurs que le chiffre est sensiblement le même pour un roman de littérature générale, hors genres de l'imaginaire. Et cette moyenne a nettement baissé en vingt-trente ans.
Les éditeurs sont perpétuellement en quête d'un nouveau best seller, comme Damasio en SF ou Jaworski en fantasy. Ces succès permettent de faire respirer leurs comptes en banque et leur permettent de prendre des risques éditoriaux en lançant de nouvelles plumes.
Dernière modification par Eunostos le 21 janv. 2024, 00:29, modifié 1 fois.
Kosmos(jeu de rôle amateur sur la mythologie grecque)
Je confirme : 3000 exemplaires écoulés forment une bonne vente, que ce soit en fantasy ou en littérature générale. Encore faut-il comprendre ce que l'on entend par là… Cela signifie que le livre a été rentable et que l'auteur et l'éditeur ont gagné un peu d'argent.
Il faut replacer ce chiffre dans le contexte actuel du marché du livre. D'une part, il existe une surproduction de titres qui provoque un éparpillement des ventes ; de l'autre, un lectorat qui ne s'agrandit pas et qui a plutôt tendance à s'éroder. Concrètement, cela induit que la majorité des livres publiés ne sont pas rentables, c'est-à-dire se vendent à quelques centaines d'exemplaires, voire pas du tout. (Il y en a qui ne sont même pas distribués en librairie et qui partent donc directement au pilon…) Il y a quelques semaines, un éditeur me rappelait encore que le modèle économique type d'une maison d'édition, c'est 20% de titres rentables pour 80% à pertes… Et l'éditeur ne survit que si les titres rentables compensent les pertes.
Il faut savoir que seuls 10% des auteurs touchent l'équivalent de 600 heures de Smic ou davantage à l'année. Les 90% restants gagnent moins, ce qui implique un faible volume de ventes.
Edit : complément à propos du marché du livre.
Grâce à la loi sur le prix unique du livre, la France a l'immense chance de posséder un des réseaux de librairies indépendantes les plus denses au monde : environ 3500. (Par comparaison, le Royaume-Uni en compte moins de 1000.) En revanche, le système de distribution du livre incite à la surproduction et au gaspillage. En effet, les librairies fonctionnent comme des dépôts-ventes : elles n'achètent les livres mis en rayon que s'ils se vendent. Les invendus sont renvoyés aux distributeurs, souvent dans un délai assez court, de l'ordre de quelques mois – et ils sont renvoyés aux frais des éditeurs. Un livre qui vient d'être publié doit donc franchir un parcours d'obstacles : il doit d'abord être mis en place dans un nombre suffisant de librairies par le diffuseur ; il doit ensuite être suffisamment prescrit (par la presse, les libraires, internet, le bouche à oreille) pour se vendre vite en nombre suffisant afin que cela convainque les librairies de l'achalander à nouveau au lieu de le retourner. Si l'une de ces étapes préliminaires est ratée, le titre disparaît rapidement des magasins et il est condamné à partir au pilon.
La faible durée de mise en vente de la plupart des titres pousse les éditeurs à augmenter leurs catalogues pour avoir régulièrement des nouveautés de remplacement. Il s'ensuit une avalanche de nouveaux titres (en général plus de 600 pour la seule rentrée de septembre, plusieurs milliers à l'année) qui viennent engorger les librairies et alimenter le cercle vicieux.
Il en découle logiquement que beaucoup de titres ne se vendent pas ou se vendent très peu, la durée d'exploitation moyenne d'un nouveau livre n'étant souvent que de quelques mois, voire de quelques semaines. D'où ce chiffre : 3000 ventes d'un titre représentent déjà une bonne vente dans ce système.
Disons que pour la faire courte je me disais... 25€ x 3000 livres = 75 000€. Déduction faite de l'impression, du marketing (s'il y en a), on paie un micro salaire avec cela, pas plus. Mon allégorie sera peut-être faussée par la réalité que vous avez du milieu, mais on dirait un peu la start up permanente pour l'auteur et le fond d'investissement pour l'éditeur.
Cela me frappe d'autant plus que l'imaginaire me semble avoir le vent en poupe une première fois vers 2000 avec les succès d'Harry Potter et plus récemment avec l'adaptation de Game of Thrones vers 2010.
Sur les 75000 € que tu mentionnes, environ 15000 € reviendront à l'éditeur et peu ou prou 7500 € à l'auteur. (Et encore : s'il a un pourcentage de 10%, ce qui n'est pas toujours le cas…) Le reste partira dans les caisses de l'imprimeur, du diffuseur-distributeur et des libraires.
Cela explique pourquoi l'immense majorité des auteurs exerce une autre profession alimentaire…
Je retombe malgré moi sur mon fondement (et sur ton propos Usher) parce que... je hantais une page Facebook de JDR et quelqu'un parlait de GODS, jeu dont j'ignorais l'existence et à la sortie à venir. Un nom m'interpelle, celui de Julien Blondel qui a signé le fabuleux et enténébré Elric chez Glénat qui trône dans ma bibliothèque. Que lis-je dans la description de ce Ulule : "Julien est aussi professeur de kayak et vit en France, près de Paris.", d'où ma rechute.
Professeur ?
Je saisi la perche en guise de transition capilotractée :
Bientôt on verra des gens mettre leurs enfants dans les écoles privées pour leur éviter... de porter l'uniforme ! !
Vu qu'ils semblent bien partis pour l'imposer dans le public.
C'est le monde à l'envers.
Quand nous vendront-ils l'ouverture d'école de garçons et d'école de filles comme grande mesure progressiste ?
J'ai assisté aujourd'hui à un splendide numéro de Tartuffe. Je ne peux pas trop en dire plus pour l'instant, mais c'était tellement gratiné que je suis plus admiratif que furieux. (Et pourtant, j'aurais vraiment motif à voir rouge.)
Usher a écrit : ↑26 janv. 2024, 19:37
J'ai assisté aujourd'hui à un splendide numéro de Tartuffe.
Il faut voir les choses du bon côté : certaines personnes se démènent pour que vivent, encore aujourd'hui, les grands classiques des lettres françaises...
Usher a écrit : ↑26 janv. 2024, 19:37
J'ai assisté aujourd'hui à un splendide numéro de Tartuffe. Je ne peux pas trop en dire plus pour l'instant, mais c'était tellement gratiné que je suis plus admiratif que furieux. (Et pourtant, j'aurais vraiment motif à voir rouge.)
Non mais... du coup... c'est un sacré teaser Usher ça. C'est pas très sympa de nous laisser gauiller comme ça.
Oswald a écrit : ↑29 janv. 2024, 19:41
Non mais... du coup... c'est un sacré teaser Usher ça. C'est pas très sympa de nous laisser gauiller comme ça.
Pour le moment, je ne peux pas en dire plus. Mais un jour, tôt ou tard, ça finira par sortir. De toute façon, je prends des notes avec application – et ça me fait déjà un joli dossier.
Pour ce que j'en sais d'après d'autres sources, le chiffre n'a hélas rien de fantaisiste. Il faut voir qu'il y a un gouffre entre les quelques titres qui se vendent énormément, parce que célèbres et/ou adaptés en films/jeux/etc., et tout le reste. Bien sûr, un George R. R. Martin, une Robin Hobb ou Tolkien se vendent plus que ça (encore que, pour Tolkien, ça dépend si on parle de ses livres les plus connus ou des autres). Mais la majorité des auteurs et autrices de fantasy, en France, vendent peu. Il me semble d'ailleurs que le chiffre est sensiblement le même pour un roman de littérature générale, hors genres de l'imaginaire. Et cette moyenne a nettement baissé en vingt-trente ans.
