Je me permets de reporter ici le commentaire que j'ai posté sur le site du Fix en réaction à la chronique écrite, à propos du livre de base en VF, par le compère Narbeuh :
Et il est où le mode Cocotte en papier, hein ?
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Déclaration liminaire : le film de Ridley Scott est, depuis la première fois que je l’ai vu (au moment de sa sortie, quand « 2019 » semblait si loin dans le futur), parmi mes films préférés. Et je garde beaucoup d’affection pour le roman de Dick, que j’ai lu peu après avoir vu le film, et dont le titre original me plaît toujours autant.
Et je n’avais pas attendu la sortie d’un JDR « sous licence » pour m’embarquer dans des parties dans l’ambiance de
Blade Runner, en bricolant à partir de jeux de « futur proche » ou en restreignant des aspects de jeux cyberpunk. Cependant, le jeu de Free League n’avait aucune chance de passer sous mon radar ! Je l’ai découvert en VF par la boîte d’initiation, et en VO pour le livre de base complet en version PDF.
Premier contact : le visuel. Les images me ramènent – avec plaisir – dans l’esthétique du film de Scott. Madeleine de Proust « néon-polar ». Mais les textes en clair sur fond noir et en noir sur gris me fatiguent la vue (je n’ai plus l’âge de celui qui découvrait le film l’année de sa sortie !), et la maquette en pavés rectangulaires me semble aller à l’encontre de l’ambiance.
Deuxième contact : le traitement de l’univers. Ressenti mitigé, car – à la lecture –, je trouve qu’il y a moins de matière d’ambiance dans le texte que dans les images. Les aspects techniques et procéduriers me semblent prendre le pas sur la matière vivante de la ville.
Troisième contact : la proposition ludique. Probablement par imprégnation de très longue date dans le polar, depuis mes premières lectures de Hammett et Chandler, j’ai du mal à voir ce genre d’ambiance comme propice à un jeu à « groupe de PJ », surtout avec une proposition ludique qui incite à la séparation des PJ travaillant sur une même affaire (par le biais de quarts, comme signalé par Narbeuh) ; je n’accroche pas à cette artificialité. Pour creuser dans le sens des réflexions morales, philosophiques, d’un PJ, je n’envisage de jouer à
Blade Runner que sous une forme peu vendeuse pour un éditeur, je le reconnais : la partie en tête à tête (1MJ, 1 joueur/joueuse).
Enfin, je rejoins les questions de Narbeuh sur les scénarios : d’une part, quant aux doutes sur la faible variété apparente des intrigues ; d’autre part, sur la difficulté à produire, soi-même, les aides de jeu très formalisées. Autant le deuxième niveau de doute me semble surmontable (des rôlistes capables d’avaler des pizzas froides sauront jouer avec des aides de jeu bricolées !), autant le premier soulève, pour moi, des interrogations de fond.